Quoiqu’encore tabou, l’abus est un sujet dont on parle de plus en plus. Pourquoi ? Parce qu’un tiers de la population féminine du monde s’est fait, se fait ou se fera abuser dans leur vie. Il se commet plus d’un million de viols chaque année en Amérique du Nord, mis à part les autres types d’abus. Vu l’ampleur du phénomène, je dédie un texte à ce sujet. J’ai choisi de traiter le sujet à la suite d’une question que j’ai reçue : comment pouvons-nous aimer l’humain et refaire confiance aux hommes après un viol ? Et comment faire pour ne pas verser dans la rage, le ressentiment et la folie ? Ma réponse courte et concise a pour but de simplifier et de minimiser les interprétations. Dans aucun cas, je ne voudrais diminuer l’expérience que plusieurs femmes, certains hommes et trop d’enfants vivent.
Il faut d’abord tenter de concevoir que ce n’est ni l’humain, ni l’être qui a commis le viol, mais l’état d’inconscience dans lequel il était. Je ne veux pas déresponsabiliser l’humain qui commet de tels actes, car d’une certaine façon, son manque de cheminement l’a maintenu dans cet état d’inconscience. Mais comment peut-il être conscient de ce qu’il ignore ? C’est comme un enfant de quelques mois, encore ignorant de la douleur qu’il peut infliger, en nous tirant les cheveux ou nous mettant les doigts dans les yeux. Pouvons-nous vraiment lui en vouloir ? Non, car il ignore le mal qu’il peut créer. Nous pouvons toutefois en vouloir à l’ignorance, à l’inconscience, car elles sont créatrices de douleur. Si nous dirigeons notre haine vers l’état d’inconscience ou d’ignorance plutôt que de la projeter directement vers la personne, il nous est possible de continuer à aimer les humains qui ne sont pas « possédés » par cet état d’ignorance. C’est d’une certaine façon, de « compartimenter » sa haine. Si nous avons refoulé la haine et la colère depuis l’évènement, il sera difficile, voire même impossible, de la compartimenter. Il faut alors l’exprimer, la vivre pleinement. Si nous la réprimons, nous la nourrissons inconsciemment et la laissons nous écraser par la culpabilité. Laquelle ? La culpabilité de ne pas s’être défendu(e), débattu(e), d’avoir été soumis(e) et même, la culpabilité de ne pas trouver de réponse à : pourquoi moi ? Une fois compartimentées, nous pouvons vivre et exprimer notre haine et notre culpabilité en toute liberté. Laissez place à la révolte ! Un jour, la colère envers l’inconscience se transformera en un désir pour la conscience. Cette agression qui, de prime abord, nous handicapait et constituait un « obstacle » à notre cheminement se transformera en une poussée d’évolution vers la conscience. Cette transformation ne peut qu’avoir lieu avec une ouverture au changement. Mon but ici n’est pas de banaliser cet évènement qui est venu bouleverser la vie de millions de personnes, mais plutôt d’aider à canaliser cette expérience pour l’utiliser comme un moyen de propulsion vers l’évolution spirituelle.